Dr Babinet, pouvez-vous vous présenter brièvement ?
Je suis néphrologue au Mans depuis 1984, au Centre Hospitalier jusqu’en 2009, puis à l’ECHO (établissement associatif) sur le site d’un regroupement de cliniques au Pôle Santé Sud jusqu’à la fin de cette année 2021. Mon activité est celle d’un néphrologue polyvalent : néphrologie clinique, dialyse aiguë ou chronique et suivi très autonome d’une importante cohorte de patients transplantés.
Pouvez-vous nous parler de ce patient greffé en 1975 que vous avez suivi ?
Le service de néphrologie au Mans a été créé en 1975 par le Dr Pierre Lebon, il n’y avait pas de transplantation dans notre région, celle-ci a démarré au début des années 80 à Nantes. Les quelques patients greffés recevaient leur greffon à Paris (Pitié, Broussais, Foch) où ils étaient suivis presque exclusivement. Le traitement immunosuppresseur ne comportait que l’azathioprine et les corticoïdes et la survie des greffons n’excédait pas quelques années….
Le recul très important montre par lui-même que Monsieur X... n’a pas posé de problèmes particuliers en dehors de l’apparition de petites tumeurs de la peau successives et traitées, quasi incontournables après 25 ou 30 ans de greffe. La recherche d’éléments plus anciens a buté sur la destruction du dossier antérieur à 1990.
Pourquoi ce patient n’était-il pas suivi par une équipe de greffe ?
Après la fermeture/transfert de l’Hôpital Broussais et les départs progressifs des médecins de l’ancienne équipe (personne n’a oublié la personnalité exceptionnelle du Dr Jeanine Bedrossian), ce patient a été suivi exclusivement au Mans. Je pense avoir montré à 2 reprises son dossier au staff de transplantation de Nantes, notamment pour valider l’arrêt définitif de l’azathioprine et ne conserver qu’une petite dose de corticoïdes. La fonction du greffon est toujours parfaite, probablement un bon modèle de «tolérance» immunologique.
Une anecdote ? C’est en posant la question de l’âge « anatomique » du greffon (donneur décédé) de ce patient à l’Agence de la Biomédecine que cet échange avec le pôle REIN a débuté. Mais la réponse à cette question n’est pas dans la base Cristal.
Combien y a-t-il de patients greffés depuis plus de 40 ans encore porteur de leur greffon rénal ?
D'après le pôle REIN, il y a actuellement, dans CRISTAL, 95 patients greffés entre 1968 et 1980 toujours considérés comme porteurs de leur greffon rénal. 85% d’entre eux ont une date de dernières nouvelles récente (> 2018). 15% d’entre eux ont une date plus ancienne, laissant peut-être à penser qu’ils sont perdus de vue par l'équipe de greffe.
Quelle était la date des dernières nouvelles dans CRISTAL pour ce patient ?
1998 ! En effet, son suivi était effectué en dehors du service de greffe et les informations n’ont pas été transmises. Pour le registre REIN, ce patient ne faisait pas partie de la cohorte des patients greffés, en raison de cette date de dernières nouvelles trop ancienne. Il est donc très important que les néphrologues qui suivent des patients greffés en dehors du service de greffe, fassent suivre les informations à l’équipe de greffe ou au Pôle Qualité des Données de l'Abm (pqd@biomedecine.fr).